Bonjour. Dans cette dernière session, nous allons présenter deux applications des résultats que nous avons démontrés les semaines précédentes. La première application explique comment utiliser la réduction modulo un nombre premier pour calculer la groupe de Galois d'un polynôme à coefficient entier. Nous appliquons cette méthode sur trois exemples. La seconde application est une démonstration de l'irréductibilité des polynômes cyclotomiques sur Q. C'est Yves qui vous présentera cette deuxième application. Nous allons maintenant expliquer sur quelques exemples comment utiliser les résultats démontrés la semaine dernière pour calculer le groupe de Galois G d'un polynôme grand P à coefficient entier. Voici le mode d'emploi. Première étape, on vérifie que P, le polynôme, est irréductible ou bien, si ce n'est pas le cas, on le décompose en produit de facteur irréductible et on applique la méthode à chacun des facteurs. En d'autres termes, on se ramène au cas ou P est irréductible. Cependant, on peut attendre l'étape numéro trois pour cette vérification comme on le verra sur les exemples. Deuxième étape, on choisit un nombre premier petit p tel que la réduction de grand P modulo P soit à racines simples, de même degré que grand P. Dans la pratique, cela se fait en essayant les petits nombres premiers. Ou alors, on peut aussi utiliser le résultat suivant qu'on a démontré précédemment en exercice. La réduction de grand P modulo P est à racine simple si et seulement si le nombre premier petit p ne divise pas le discriminant de grand P. Alors, évidemment, ça nécessite de calculer le discriminant de grand P. Ce résultat nous dit aussi qu'il n'y a qu'un nombre fini de mauvais nombre premier petit p, c'est-à-dire de nombre premier p, tel que la réduction de grand P ne soit pas racines simples. Troisième étape, on va décomposer à l'aide par exemple d'un logiciel de calcul formel, la réduction P barre de grand P modulo, le nombre premier petit p en produit de facteurs irréductibles. On note les degrés de ces facteurs d1, d2, dm et puisque P barre a même degré que P, on va avoir d1 + d2 + dm = degré de P et on note degré petit n. Dans cette situation, on a vu en exercice que le groupe de Galois qu'on note G barre de P barre est cyclique. De plus, il est engendré par l'automorphisme de Frobenius, grand F qui, vu comme élément de Sn est une permutation de type d1, d2, dm. Cela signifie, je vous le rappelle, qu'on peut l'écrire comme produit de cycles à supports disjoints de longueurs respectives d1, d2, dm. Ensuite, la forme forte du théorème de réduction modulo p nous dit que G barre est isomorphe à un sous-groupe de grand G et plus précisément que G contient une permutation de même type que f, c'est-à-dire de type d1, d2, dm. En particulier, si P barre est irréductible, il y a un seul degré di qui est égal à n et G contient un n cycle. Quatrième et dernière étape, on effectue des réductions modulo différents nombres premiers, petit p. Et on obtient ainsi des éléments de grand G qui, si on a de la chance, sont des permutations de type varié et si on produit ainsi suffisamment d'éléments de grand G, on arrive à montrer que grand G est. Alors en général, dans les exemples qu'on va présenter, la conclusion sera que grand G est soit le groupe Sn en entier, soit le groupe alterné An. À ce propos, je rappelle que G est contenu dans le groupe An si et seulement si son discriminant est un carré dans grand Q. Je vous rappelle que le discriminant est calculé à l'aide des coefficients de grand P et donc, c'est un entier. Et donc, pour un entier, être un carré dans Q, c'est pareil que d'être un carré dans Z. Donc, la dernière étape, numéro quatre, je vous rappelle, consiste à réduire modulo différents nombres premiers et produire ainsi des éléments de grand G qui sont de types assez variés. Alors, pour conclure que grand G est égal à An ou Sn, nous aurons besoin de deux résultats sur les sous-groupes de Sn. Donc le groupe de Galois d'un polynôme irréductible, je vous le rappelle, c'est un sous-groupe transitif du groupe des permutations de ses racines. Donc ces deux théorèmes portent sur les sous-groupes transitifs de Sn. Le théorème un est le suivant. Un sous-groupe transitif de Sn qui contient une transposition est un p-cycle, pour un nombre premier p strictement supérieur à n sur 2, est égal à Sn en entier. Bien évidemment, le nombre premier P qui intervient ici n'a rien à voir avec le nombre premier P modulo, lequel on faisait les réductions. Théorème deux, un sous-groupe transitif de Sn qui contient un 3-cycle et un p-cycle, pour un nombre premier p strictement supérieur à n sur 2 est An ou Sn. Donc, ce sont ces deux théorèmes qu'on va utiliser dans les exemples. La preuve n'est pas toute simple et nous avons choisi de vous la présenter dans un document annexe. Faisons maintenant le premier exemple, c'est celui du polynôme P de X = X5- X- 1 qui est bien coefficient entier. Donc comme expliqué tout à l'heure, je vais passer à l'étape un, l'étape de vérification de l'irréductibilité de P puisqu'on va l'obtenir à partir des réductions modulo des nombres premiers. Alors, ces réductions qu'on regarde, elles ne sont pas prises au hasard, mais c'est celles qui vont nous permettre d'obtenir des conclusions intéressantes. On regarde la réduction modulo 2 et la réduction modulo 5. Donc vous voyez les factorisations qui apparaissent à l'écran. Et en particulier, comme il est écrit, la réduction modulo 5 est irréductible. Alors, je prétends que cela entraîne que P est irréductible sur Q. Pourquoi? Eh bien, sinon, P serait décomposable en produit de polynôme irréductible qui serait de degré strictement plus petit que 5. Ces facteurs irréductibles sur Q sont en fait à coefficients entiers. C'est quelque chose qu'on a démontré en exercice. Donc, la réduction de P en produit de facteur irréductible à coefficients entiers, on peut la réduire, modulo 5, par exemple, et ça donnerait une des compositions de P barre modulo 5 en produits de polynômes dont au moins l'un d'entre eux serait de degré inférieur à la moitié de 5, c'est-à-dire de degré 1 ou 2. En tout état de cause, cela contredit le fait que P barre est en fait irréductible, modulo 5. Donc l'irréductibilité modulo 5 entraîne l'irréductibilité de P sur Q. Donc ça, c'est un argument un peu général. Donc la première conséquence, c'est que le groupe de Galois vu comme sous-groupe de S5 est un sous-groupe transitif. Regardons maintenant la réduction modulo 2. Donc là, il y a deux facteurs, un de degré 2, un de degré 3. Donc ce que j'ai expliqué au début de la vidéo nous dit que G contient une permutation de type 2, 3, c'est-à-dire le produit d'une transposition et d'un 3-cycle à supports disjoints. Ça, c'est la première chose. La réduction modulo 5, elle, nous apprend que grand G contient un 5-cycle. Donc on n'est pas tout à fait encore dans les conditions d'application des théorèmes que j'ai énoncé tout à l'heure. L'astuce, c'est de faire la chose suivante. On a notre permutation de type 2, 3, produit d'une transposition et d'un 3-cycle. Quand j'élève cette permutation à des puissances, au carré, au cube, et cetera, comme les deux cycles qui apparaissent, la transposition des trois cycles sont à supports disjoints, ils commutent. Donc pour élever par exemple cette permutation au carré, on élève la transposition au carré et le 3-cycle au carré et ainsi de suite. Donc, l'idée, ce n'est pas d'élever au carré, mais au cube. Donc le cube de la transposition, c'est la transposition elle-même, le cube du 3-cycle, c'est l'identité et on obtient donc que G contient une transposition. Donc résumons. G contient un 5-cycle, on a obtenu ça par réduction modulo 5. Et G contient une transposition, comme on vient de la voir, et le théorème un nous permet de conclure que G = S5, Je vous rappelle que le théorème 1 requiert que le groupe doit contenir une transposition, et un p-cycle pour p nombre premier strictement supérieur à n sur 2. Donc ici, on prend pour p, 5. Passons maintenant au deuxième exemple, celui du polynôme qui apparait à l'écran, donc c'est un polynôme de degré 6, à coefficient entier, bien sûr, et on va utiliser ces réductions modulo différents nombres premiers. Alors tout d'abord, je commence par la réduction modulo 2 et sa factorisation, qui apparait sur l'écran, donc on voit qu'il y a 2 facteurs irréductibles, un de degré 1, et un de degré 5. Alors bien que cette réduction ne soit pas irréductible, elle va presque suffire à montrer que, P est en fait irréductible sur Q. Donc l'argument est très semblable à celui qu'on a utilisé dans l'exemple 1. Je regarde les facteurs irréductibles unitaires de P sur Q. Ces facteurs sont d'un coefficient entier, et donc devraient apparaître dans chacune des réductions de P, modulo les nombres premiers. Donc, en particulier, en utilisant cette réduction modulo 2, on voit que, si P n'est pas irréductible sur Q, alors il ne peut avoir des facteurs irréductibles que de degré 1 et 5. Donc, un facteur irréductible de degré 1, ça correspond à une racine entière de P. D'après un exercice vu dans la première semaine, puisque P est un polynôme unitaire à coefficient entier, toute racine entière de P divise son coefficient constant, c'est à dire- 10. Donc, déjà ça limite beaucoup les racines entières possibles de P, on peut réduire encore la liste des valeurs possibles en utilisant la réduction modulo 2, dans laquelle on voit que 0 est racine, et c'est même la seule racine. Cela montre que les éventuelles racines entières de P, ne peuvent être que paires. Donc il ne reste plus qu'à vérifier que, + ou- 2 et + ou- 10, ne sont pas racines de P, ce qui est très facile par calcul direct. Ainsi, nous avons montré que le polynôme P est irréductible sur Q. La conséquence pour le groupe de Galois G, vu comme sous-groupe de S6, c'est que G est un sous-groupe transitif. De plus, en revenant à la factorisation de P modulo 2, les résultats que j'ai évoqués au début de cette session, nous apprennent que G contient un 5-cycle. Alors, c'est pas suffisant, on va utiliser la factorisation de la réduction de P modulo 5, cette réduction apparaît à l'écran. Vous voyez qu'il y a 4 facteurs de degré 1, et un facteur irréductible de degré 2. La méthode générale, les résultats généraux, nous apprennent que G contient alors une transposition. Donc, G sous-groupe transitif de S6 contient une transposition et un 5-cycle, nous sommes dans les conditions d'applications du théorème 1 qui entraîne alors G égal S6. Troisième et dernier exemple, un polynôme de degré 8, qui apparaît à l'écran, coefficient entier, et comme d'habitude, nous allons regarder ses factorisations modulo les petits nombres premiers. Donc, on regarde modulo 2, il y a 2 facteurs irréductibles, de degré 3 et 5, modulo 3, un phénomène nouveau apparaît, la réduction P barre n'est pas à racine simple, donc on a vu que, pour nous, cette réduction ne va pas être utile. On réduit modulo 5, pas de chance ça recommence encore, des racines multiples, donc on laisse de côté, et on réduit modulo 7 enfin, et on obtient 2 facteurs irréductibles de degré 4. Donc je mets de côté les réductions modulo 3 et 5, qui ne vont pas nous servir, et je vois que la réduction modulo 2 nous apprend que, s'il y a des facteurs irréductibles non triviaux, ils ne peuvent être que de degré 3 et 5, mais en regardant modulo 7, on voit que s'il y a des facteurs irréductibles non triviaux, ils ne peuvent être que de degré 4, donc conclusion, il n'y a pas de facteurs irréductibles non-triviaux, et P est irréductible dans Q de x. Donc, comme d'habitude, cela entraîne que le groupe de Galois, comme sous-groupe de S8, est un sous-groupe transitif. Alors, on va regarder maintenant le discriminant de P, donc c'est ce grand nombre entier qui apparaît à l'écran et dont la factorisation aussi vous est donnée. Donc, on voit sur cette factorisation que c'est le carré d'un nombre entier, donc cela entraîne que G est un sous-groupe de A8. Remarquons au passage que, on vérifie que ce discriminant est divisible par 3, il est divisible aussi par 5, cela concorde avec le fait que la réduction de P modulo 3 et modulo 5 n'est pas à racine simple. En revanche, il n'est pas divisible par 2 et 7, donc tout ça colle bien. Alors maintenant, on va essayer de montrer que G contient assez d'éléments pour être en fait égal à tout le sous-groupe A8 de S8. Donc, revenant à la méthode générale, je regarde la factorisation modulo 2, elle nous apprend que G contient une permutation de type (3, 5). Donc, on n'est pas encore dans les conditions d'application des théorèmes que je vous ai expliqués au début, mais on va utiliser la même astuce que dans le premier exemple, on va regarder les puissances successives de cette permutation de type (3, 5), en particulier les puissances troisième et cinquième. Donc, permutation de type (3,5), c'est le produit d'un 3-cycle et d'un 5-cycle à supports disjoints. Lorsque je l'élève au cube, j'élève d'une part le 3-cycle au cube, puisqu'il commute avec le 5-cycle, donc ça devient l'identité, et le 5-cycle élevé au cube, reste un 5-cycle. Donc, G contient le cube de cette permutation de type (3, 5), qui est un 5-cycle. De la même façon, si j'élève à la puissance cinquième, j'ai d'une part le 3-cycle élevé à la puissance cinquième, donc élevé au cube, c'est l'identité, donc sa puissance cinquième c'est son carré, et son carré c'est encore un 3-cycle. De l'autre côté le 5-cycle élevé à la puissance cinquième devient l'identité, Donc, un peu de la même façon, G contient aussi un 3-cycle. Donc, conclusion, G est transitif, contient un 5-cycle et un 3-cycle, on est dans les conditions d'applications du théorème 2 qui nous permet d'affirmer que G est égal à A8. Voilà, donc j'espère vous avoir convaincu de l'efficacité de la méthode de réduction modulo un nombre premier, pour calculer des groupes de Galois dans des situations quand même relativement compliquées. Dans la deuxième partie de cette vidéo, Yves vous présentera une autre application de la méthode de réduction modulo p. Je vous remercie de votre attention, au revoir.