[MUSIQUE] Bonjour, aujourd'hui nous allons définir, et étudier, la notion de groupes résolubles. Comme on le verra très rapidement, la notion de groupes résolubles est le pendant, du côté de la théorie des groupes, de la notion d'équations résolubles par radicaux. Alors, on a abordé, au moins de façon intuitive, cette notion d'équations résolubles par radicaux. On a associé à toute équation une extension de corps, et elle est résoluble par radicaux, quand cette extension de corps, définie à partir du corps des racines de ce polynôme, s'obtient, de proche en proche, au fur et à mesure, à partir d'équations élémentaires, obtenues juste en extrayant une racine nième. Du côté de la théorie des groupes, la notion de groupes résolubles s'obtient, elle aussi, au fur à mesure, de proche en proche, à partir d'une brique élémentaire, et cette brique élémentaire, c'est la notion de groupes commutatifs. Du côté de la théorie des corps, la brique élémentaire, était simplement l'extraction d'une racine nième, du côté de la théorie des groupes c'est donc la notion de groupes commutatifs qui va jouer ce rôle. Alors regardons maintenant, de manière précise, ce que ça veut dire. Alors on dira qu'un groupe G est résoluble, s'il existe une suite, dite de compositions, c'est-à-dire, une suite décroissante de sous-groupes, G égale G zéro, qui contient G1 etc. qui contient G n, G n, étant le groupe trivial réduit à un élément ; avec deux hypothèses. Pour tout i, G i plus 1, est distingué dans, G i. Ce qui permet de considérer le groupe quotient, G i, sur G i plus 1 ; et la seconde hypothèse est que ce groupe quotient, G i, sur, G i plus 1, est commutatif pour tout i. Alors donnons quelques exemples. D'abord, bien entendu, tout groupe commutatif est résoluble. C'est heureux, pour une brique élémentaire. Pourquoi? Eh bien, tout simplement, vous prenez n égale 1, G zéro, le groupe lui-même, et ça satisfait les hypothèses de la définition. Bien entendu, S1 et S 2 sont résolubles. S1 a un élément, S2 est commutatif à deux éléments, S3 et S 4 sont résolubles. Alors je vous invite à réfléchir par vous-mêmes, éventuellement à discuter sur le forum, de toute façon ce sera proposé en exercice, très bientôt. Là encore un bon sujet de discussion sur le forum, est de regarder un exemple tiré de la géométrie ou de l'algèbre, comme on veut, le groupe des matrices triangulaires par exemple à coefficient réel supérieur, disons, est résoluble. Alors regardons des exemples de groupes qui ne sont pas résolubles. Comme on le verra, le groupe, S n, pour n supérieur ou égal à 5, n'est jamais résoluble. Alors vous voyez ici que, on a une opposition, entre le cas des groupes symétriques, S n, n inférieur ou égal à 4, qui sont résolubles, et le cas des groupes symétriques, S n, n supérieur ou égal à 5, n'est pas résoluble. Du côté de la théorie des corps, nous avons discuté le fait que une équation de degré inférieur ou égal à 4 est résoluble par radicaux, tandis que, en général, une équation de degré supérieur ou égal à 5, elle, n'est pas résoluble par radicaux. Eh bien c'est l'énoncé analogue qu'on retrouve ici, du côté de la théorie des groupes, la non résolubilité des groupes symétriques pour n supérieur ou égal à 5, alors que pour n inférieur ou égal à 4, nous avons des groupes résolubles. Alors voyons un exemple, tiré de la géométrie, de groupe non résoluble, eh bien par exemple, vous pouvez prendre le groupe des matrices inversibles, et réelles, de taille strictement plus grande que 1. Là encore, je vous invite à réfléchir par vous-mêmes, et discuter entre vous sur le forum, mais ce point sera discuté dans un exercice. Alors voyons le résultat clé qui nous permettra de démonter le théorème de non résolubilité de Galois. La proposition est la suivante. Elle est très simple. Un sous-groupe H, d'un groupe résoluble G, est lui-même, résoluble. Alors comment on peut prouver ça? Puisque G est résoluble, il a une suite de compositions, au sens de la définition précédente, les G i. À l'aide de cette suite de compositions, on va tout simplement fabriquer une suite de compositions, H i, pour le groupe H. Alors on n'a pas énormément de choix pour construire des sous-groupes, H i, on va prendre, H i, l'intersection de H et de G i. Et je vais vérifier les deux hypothèses. D'abord que, H i plus 1, est bien distingué dans, H i. Et deuxième point, que le groupe quotient, H i, sur, H i plus 1, est bien commutatif pour tout i. Alors pour faire ça, je considère le noyau du morphisme composé, inclusion de, H i, dans, G i, puis projection, G i, sur, G i sur, G i plus 1. Alors, calculons ce noyau. Un élément est dans le noyau, eh bien, s'il appartient à, H i, et si son image dans, G i sur, G i plus 1, est triviale. Par définition, ça veut dire que son image est dans, G i plus 1, et donc ce noyau n'est rien d'autre que l'intersection de, H i, et de, G i plus 1. Remplaçons, H i, par sa valeur, c'est donc, H inter, G i, inter, G i plus 1, mais, G i plus 1, est contenu dans, G i. De sorte que ce noyau n'est rien d'autre que l'intersection de H et de, G i plus 1, c'est-à-dire, par définition, Hi plus 1. Comme tout noyau, il est distingué dans le groupe de départ, c'est-à-dire que, H i plus 1, est un sous-groupe distingué de, H i. D'autre part, je peux utiliser la propriété universelle du quotient, qui me dit que, le morphisme composé de, H i, vers, G i sur, G i plus 1, se factorise à travers, H i plus 1, pour donner un morphisme injectif, de, H i sur, H i plus 1, dans, G i sur, G i plus 1. Ainsi, H i sur, H i plus 1, peut être considéré comme un sous-groupe de, G i sur, G i plus 1, mais nous savons que, G i sur, G i plus 1, est un groupe commutatif. Un sous-groupe d'un groupe commutatif est commutatif. Et donc, H i sur, H i plus 1, est commutatif. On a donc bien vérifié que cette suite de ce groupe, H i, de H, est une suite de compositions au sens de la définition précédente, et donc que H est un groupe résoluble comme l'était le groupe G de départ. Passons au résultat clé, pour nous, que j'ai annoncé tout à l'heure, à savoir que, pour n supérieur ou égal à 5, le groupe de permutations, S n, n'est pas un groupe résoluble. Alors, pour prouver ce résultat, je vais introduire une notion nouvelle de théorie des groupes, qui est la notion de commutateur de deux éléments. Donc, étant donné deux éléments, g et h, d'un groupe G, on définit le commutateur de g et de h, qu'on note la plupart du temps, g, h, entre crochets, comme étant le produit des quatre éléments, dans l'ordre indiqué, g, h, g moins 1, h moins 1. Alors, pourquoi on appelle ça un commutateur? Eh bien, ça mesure le défaut de commutativité de g et h. En effet, on a, comme vous le vérifiez aisément, g h, égale, h g, c'est-à-dire g et h commutent, si et seulement si, le commutateur de g et de h, est trivial, réduit au neutre. C'est pour ça qu'on appelle ça le commutateur de deux éléments. Alors, commençons par un lemme, qui est très simple à démontrer, mais qui est très utile. Étant donné un morphisme de groupe de G dans gamma, où gamma est un groupe commutatif, alors pour tout, g h, dans G, l'image par phi, du commutateur de g et de h, c'est le commutateur de phi de g et de phi de h, et c'est donc le neutre de gamma. En effet, comme je l'ai indiqué, puisqu'on est dans un groupe commutatif, phi de g et phi de h commutent, et donc le commutateur de phi de g et de phi de h est trivial. Alors comment on fait ça? Eh bien, on calcule. Phi, du commutateur de g et de h, c'est phi de, g h, g moins 1, h moins 1, comme phi est un morphisme, il respecte le produit et le passage à l'inverse ; c'est donc aussi, phi de g, phi de h, phi de g moins 1, phi de h moins 1, et on reconnaît là, le commutateur de phi de g et de phi de h. Et ce commutateur est trivial, puisque le groupe gamma est abélien. Alors, la proposition qui va nous permettre de démontrer le théorème de non résolubilité est le résultat suivant. C'est que si n est supérieur ou égal à 5, le groupe alterné, A n, des permutations paires, de signature, plus 1, est engendré par ces commutateurs Admettons un instant cette proposition, et démontrons le théorème, à savoir que, pour n supérieur ou égal à 5, le groupe Sn n'est pas un groupe résoluble. Alors, procédons par l'absurde. C'est-à-dire supposons que Sn est résoluble pour un certain n supérieur ou égal à 5. Alors, si c'était le cas, d'après la proposition que nous venons de démontrer, An serait résoluble en tant que sous-groupe d'un groupe résoluble. Bien, mais comme An est supposé résoluble, j'affirme qu'il existe un sous-groupe H, distingué dans An, qui est un sous-groupe propre, H est différent de R, tel que le quotient An sur H est un groupe commutatif. Alors pourquoi ça? Tout simplement, vous prenez votre groupe An, qui est supposé résoluble, et vous prenez une suite de compositions, je vais appeler ça Hi. Alors vous pouvez supposer que cette suite de composition est strictement décroissante, Hi + 1 est différent de Hi, il n'est pas simplement distingué et inclu dans Hi, il est différent, sinon vous le supprimez, et donc vous avez une suite strictement décroissante Hn distingué dans Hn- 1, etc., distingué dans H0 = An comme indiqué, avec Hi sur Hi + 1 commutatif et H0 = An, le groupe de départ. Eh bien, comme An est différent du groupe trivial réduit à un élément, n est supérieur ou égal à 5, donc n factoriel sur 2 est strictement plus grand que 1, m, le nombre d'éléments, est certainement non nul. Vous n'avez pas un seul élément dans cette suite de composition. Il vous suffit alors de poser H, le premier groupe non trivial qui apparait, H = H1, donc c'est bien un groupe de la suite de composition qui satisfait aux exigences. Alors, comme n est supérieur ou égal à 5, nous savons, d'après la proposition que nous avons admise pour un moment, que les commutateurs engendrent le groupe alterné An, mais donc d'après le lemme, leur image dans le groupe quotient An sur H est triviale. Puisque n sur H est commutatif. Bien. Mais comme le morphisme de An dans An sur H est surjectif par construction, ça veut dire que An sur H est engendré par l'image de An, mais cette image de An est réduite au neutre, ça veut dire que le groupe quotient An sur H est trivial réduit à un élément, autrement dit que An = H. C'est une contradiction puisque nous avons supposé que H était un sous-groupe propre différent de An. Ainsi, on a bien démontré que la proposition précédente, à savoir que le groupe alterné An est engendré par les commutateurs, impliquait le théorème de non résolubilité de Sn pour n supérieur ou égal à 5. Alors, comment on fait pour démontrer maintenant la proposition, à savoir que An est engendré par les commutateurs? Alors Olivier vous a expliqué pourquoi les 3-cycle engendraient An. Du coup, il suffit de montrer que tout 3-cycle est un commutateur dans An. Alors, quitte à renuméroter les éléments sur lequel Aj est le groupe symétrique, on peut supposer que ce 3-cycle est simplement le 3-cycle (1, 2, 3). Et on va démontrer que c'est un commutateur. Alors on fait un petit calcul, regardons le carré de (1, 2, 3). Le carré de (1, 2, 3) c'est simplement le 3-cycle (1, 3, 2). Et soit vous calculez à la main, soit vous vous souvenez ce que c'est le conjugué d'un n-cycle, vous obtenez que (1, 3, 2) c'est rien d'autre que (1, 2) (1, 2, 3) (1, 2). Et c'est là où n supérieur ou égal à 5 intervient. Vous avez trois éléments : 1, 2, et 3. Mais comme n est supérieur ou égal à 5, il vous reste deux autres éléments, qui ne sont ni 1, ni 2, ni 3. Ces deux autres éléments, je les baptise 4 et 5. Et je considère la transposition (4, 5) qui échange 4 et 5. Comme le support (4, 5) de la transposition est différent du support (1, 2, 3) du 3-cycle, la transposition (4, 5) commute avec (1, 2, 3). Je peux donc reprendre le calcul précédent et intercaler (4, 5). (1, 2, 3) au carré c'est donc (1, 2), j'intègre (4, 5) (4, 5), (1, 2, 3) (1, 2). En effet, (4, 5) (4, 5), ça vaut l'identité. Mais comme (4, 5) commute avec (1, 2, 3), c'est aussi (1, 2), (4, 5) (1, 2, 3) (4, 5) (1, 2). (1, 2) et (4, 5) commutent entre eux pour des raisons de support, chacune est son propre inverse, et donc on trouve que ça vaut (1, 2) (4, 5), facteur de (1, 2, 3), facteur de l'inverse de (1, 2) (4, 5). Pour conclure, il me reste à observer que la permutation qui intervient dans l'expression précédente, à savoir sigma = (1, 2) (4, 5). est une permutation R de signature +1, c'est-à-dire un élément du groupe alterné, et de multiplier l'expression précédente par l'inverse de (1, 2, 3). Qu'obtient-on? Eh bien, on obtient que (1, 2, 3) est égal à (1, 2, 3) -1, sigma (1, 2, 3) sigma- 1, c'est-à-dire que (1, 2, 3) est le commutateur de l'inverse de (1, 2, 3) et de sigma, deux éléments du groupe alterné. Et j'ai bien démontré la proposition, à savoir que tout 3-cycle est un commutatuer et que comme les 3-cycle engendrent le groupe alterné, tout élément du groupe alterné est un produit de commutateur d'élément du groupe alterné. Je vous remercie pour votre attention et je vous donne rendez-vous la semaine prochaine pour la preuve du théorème de non-résolvabilité de Galois. Merci, à bientôt!